Covid et baisse des émissions de CO₂ : une nouvelle étude fait le point secteur par secteur

Avec la pandémie, de nouveaux modes de vie – on pense notamment à la diminution drastique de l’usage des voitures – sont apparus. La distanciation sociale imposée par le Covid-19 change notre façon de vivre et de travailler.

Le nombre de personnes à vélo ou marchant a ainsi connu une envolée inédite. Bogota, Berlin et Vancouver ont élargi leurs voies cyclables. À Paris, un vaste réseau de voies pour les vélos est également en cours d’élaboration.

Mais, une fois passée la crise, le système reviendra-t-il à la « normale » ? Et le devrait-il ?

C’est l’une des nombreuses questions qui émergent à l’heure où l’effet de la pandémie sur les émissions de carbone commence à se préciser.

Au-delà de la pandémie

Dans un article de recherche – publié ce mardi 19 mai 2020 dans la revue scientifique Nature Climate Change –, nous montrons comment le Covid-19 a affecté les émissions de CO2 dans six secteurs économiques (énergie, transport routier, industries, services publics et commerces, residentiel et aviation) à l’échelle mondiale.

Nous avons ainsi découvert que les niveaux d’activité restreints ont entraîné une baisse maximale de 17 % des émissions mondiales quotidiennes début avril, par rapport à 2019.

Ces données sont précieuses à un moment où nous considérons qu’un changement structurel profond est nécessaire pour orienter l’économie mondiale vers la neutralité carbone.

Prenons le cas de nos rues devenues soudain si calmes avec le confinement. La chute du trafic routier est l’un des principaux moteurs de la baisse des émissions mondiales durant la pandémie. Par conséquent, si nous encourageons le vélo et le télétravail au-delà de la pandémie actuelle, nos objectifs climatiques pourraient devenir plus facilement réalisables.

Émissions fossiles quotidiennes mondiales de CO₂, en millions de tonnes. Les lignes en pointillés représentent différents scénarios futurs d’émissions fonction de l’évolution de la pandémie et des niveaux de confinement. CC BY-NC-ND

Des données précises et variées

Chaque fin d’année, nous publions le « Global Carbon Budget », un rapport annuel de référence sur les tendances mondiales et régionales du cycle du carbone. Les circonstances inédites que nous traversons nous ont incités à effectuer une analyse préliminaire.

Cette analyse a consisté à estimer comment la pandémie a pu influencer les émissions quotidiennes de CO2 dans 69 pays – couvrant 97 % des émissions mondiales –, pour six secteurs économiques.

Il a fallu collecter, de façon très détaillée et variée, de nouvelles données à partir de diverses sources pendant la période de confinement. Nous avons, par exemple, examiné l’activité de transport routier et aérien à l’aide des données de trafic fournies par TomTom, de mobilité grâce à Apple Maps ainsi que des données relatives aux décollages d’avions dans les aéroports. Nous avons aussi eu recours à des données quotidiennes portant sur les changements de consommation d’électricité ou l’activité industrielle.

Nous avons ensuite construit un « indice de confinement » – de 0 (pas de confinement) à 3 (confinement le plus strict) – dans chaque pays afin d’extrapoler les données disponibles au niveau mondial.

Le pic pandémique

Début avril 2020, au plus fort de la crise, le recul de l’activité mondiale a entraîné une baisse de 17 % des émissions quotidiennes mondiales – soit 17 millions de tonnes par jour – par rapport à la moyenne quotidienne de 2019.

Au cours de cette période, les émissions quotidiennes totales auront été similaires à celles observées en 2006. Le fait que le monde émette autant, dans des conditions de confinement strict, qu’il y a 14 ans, dans des conditions normales, souligne la croissance rapide de nos émissions de CO2 ces dernières années.

Avec une part de 43 % dans la réduction globale, le trafic routier aura le plus contribué à la baisse des émissions. Parmi les autres contributeurs de poids, on trouve le secteur de la production d’énergie et celui de l’industrie (avec notamment la fabrication de produits et matériaux tels que le ciment et l’acier).

L’ensemble de ces trois secteurs est à l’origine de 86 % de la baisse des émissions journalières durant le confinement.

Ampleur de la baisse des émissions de CO₂ au niveau mondial et par secteur d’activité pendant le confinement. CC BY-NC-ND

Si le secteur de l’aviation a subi une chute quotidienne de son activité de l’ordre de 60 % au niveau mondial – la plus importante baisse de tous les secteurs que nous avons analysés –, sa contribution à la baisse globale des émissions a été relativement faible (10 %), ce secteur ne représentant que 3 % des émissions mondiales.

Comme la majorité des gens sont restés à la maison, nous avons logiquement constaté une légère augmentation (de l’ordre de 5 %) des émissions mondiales du secteur résidentiel.

En France, le confinement a entraîné une baisse des émissions quotidiennes de pointe estimée à 34 %, soit deux fois plus importante que la baisse mondiale de 17 %. Cette baisse provient principalement du secteur du transport routier.

Ampleur de la baisse des émissions de CO₂ pour la France et par secteur d’activité pendant le confinement. CC BY-NC-ND

Les perspectives pour 2020

Nous avons aussi évalué la façon dont la pandémie pourrait affecter les émissions de CO2 pour le reste de 2020 – sachant que cela dépendra de l’intensité et de la durée des restrictions dans les mois à venir.

Si le confinement mondial généralisé se termine vers la mi-juin, nous estimons que les émissions globales de carbone en 2020 chuteront d’environ 4 % par rapport à 2019. Si certaines restrictions restent néanmoins en place pour le reste de l’année, la réduction serait d’environ 7 %. La gamme complète des baisses d’émissions est de 2 % à 13 %, si l’on considère les différents scénarios de pandémie et les incertitudes relatives aux données.

Plaçons ces chiffres dans le contexte du changement climatique. Selon l’Accord de Paris sur le climat et le « Gap Report » des Nations unies, les émissions mondiales doivent chuter de 3 et 7 % par an d’ici à 2030 pour limiter respectivement le changement climatique en dessous de 2 °C et de 1,5 °C. Avec la baisse des émissions prévue cette année suite au confinement, nous pourrions de fait atteindre cet objectif en 2020.

À la croisée des chemins

Stabiliser le système climatique nécessitera des modifications de nos systèmes énergétiques et économiques d’une ampleur extraordinaire – comparable à la perturbation provoquée par Covid-19. Mais comment faire pour que la baisse des émissions en 2020 impulse ces changements nécessaires et durables ?

L’expérience des crises économiques mondiales précédentes indique que, sauf actions concertées, les émissions finiront par rebondir et revenir à peu près aux niveaux d’avant crise.

Mais ce n’est pas une fatalité : le choc du confinement nous offre une occasion de changer les structures qui sous-tendent nos systèmes énergétiques et économiques. Un tel choc pourrait nous engager sur la voie de la décarbonisation de l’économie mondiale.

Évoquons à nouveau toutes ces personnes qui se sont mises récemment à la marche et/ou au vélo. Les gouvernements ne devraient-ils pas se saisir de l’occasion pour encourager et soutenir ces moyens de transport à faibles émissions et les rendre permanents ? Et si nous accélérions aussi le déploiement des voitures, vélos et trottinettes électriques pour élargir les options de mobilité tout en réduisant la pollution des milieux urbains ?

On peut aujourd’hui se féliciter que de nombreux responsables politiques souhaitent prendre une telle direction. La région Ile-de-France s’est par exemple engagée à investir 300 millions d’euros dans un réseau de « RER vélo » de 650 km reliant Paris à sa périphérie.

La crise a ouvert la voie à de multiples autres changements, permettant d’évaluer quels déplacements étaient essentiels et comment la communication à distance pouvait offrir une alternative efficace.

Si la réduction forcée de la consommation de produits et d’énergie pendant le confinement n’offre pas d’incitation directe pour réduire les émissions de gaz à effet de serre à long terme, des modes de production et consommation à plus faible demande énergétique peuvent être atteints, conduisant à un développement plus respectueux de l’environnement tout en préservant le bien-être individuel et l’activité économique.

Nous pouvons revenir rapidement à la « normale », avec des émissions de gaz à effet de serre qui continueront de suivre leur trajectoire. Mais si nous optons pour le changement, 2020 pourrait bien être le coup de pouce inattendu qui renverse à jamais la tendance mondiale des émissions.

Source : Covid et baisse des émissions de CO₂ : une nouvelle étude fait le point secteur par secteur

Grâce au machine learning, des chercheurs arrivent à prédire instantanément la résistance des matériaux

Des chercheurs ont développé une nouvelle méthode pour prédire le processus de rupture d’un matériau à l’aide de techniques de machine learning. L’objectif est notamment de pouvoir facilement connaître sa résistance aux chocs. Cette information est souvent indispensable pour les grands projets d’ingénierie. Les travaux ont été publiés le 20 mai 2020 dans la revue Matter. Cette recherche a été financée par l’US Office of Naval Research et l’Army Research Laboratory.

Un processus fastidieux

Pour prédire la façon dont un matériau se brise, les scientifiques utilisent la dynamique moléculaire, une technique de simulation numérique permettant de modéliser l’évolution d’un système de particules au cours du temps. En pratique, cette méthode consiste à simuler le mouvement d’un ensemble de quelques dizaines à quelques milliers de particules dans un certain environnement (température, pression…). Mais ce processus est très lent car il nécessite de résoudre des équations du mouvement pour chaque atome. Raison pour laquelle l’équipe de scientifiques a décidé d’explorer des moyens de rationaliser ce processus en utilisant un modèle d’apprentissage automatique.

En quelque sorte, nous faisons un détour“, schématise Markus J. Buehler, un des auteurs de la publication. “Nous nous sommes demandés ce qui se passerait si nous observions simplement comment la facture d’un matériau choisi se produit en laissant les ordinateurs apprendre eux-mêmes ?“, poursuit-il. Pour se faire, le système d’apprentissage automatique a besoin d’une variété d’exemples pour apprendre les corrélations existantes entre les caractéristiques d’un matériau et son comportement dans une situation donnée.

Une nouvelle façon de simuler la défaillance des matériaux

Dans l’étude, les scientifiques examinent une variété de revêtements composites et stratifiés faits de matériaux cristallins. “Nous simulons, atome par atome, la façon dont les matériaux se brisent et nous enregistrons ces informations”, raconte Markus J. Buehler. Ils ont généré des centaines de simulations de ce type avec une grande variété de structures et ont soumis chacune d’entre elles à de nombreuses simulations de différentes fractures. Ils ont ensuite introduit l’ensemble de ces données dans leur modèle d’apprentissage automatique pour voir s’il pouvait prédire les performances d’un nouveau matériau qui ne faisait pas partie du groupe de données initial .”La simulation informatique par IA peut faire ce qui prend normalement beaucoup de temps en utilisant la dynamique moléculaire…C’est donc une toute nouvelle façon de simuler la défaillance des matériaux“, se réjouit Markus J. Buehler.

Une simulation modélisant la propagation d’une fissure

Le temps habituellement nécessaire pour faire une simulation est considérablement réduit. Yu-Chuan Hsu, un des auteurs de l’étude, explique que “pour des simulations uniques en dynamique moléculaire, il faut plusieurs heures pour exécuter les simulations. Grâce à l’IA, il ne faut plus que 10 millisecondes pour parcourir toutes les prédictions des modèles et montrer comment une fissure se forme par étape”.

Applicable à la fracture osseuse

Ce système pourrait être utilisé pour développer des revêtements protecteurs ou des matériaux structuraux plus solides, par exemple pour protéger les avions ou les véhicules spatiaux des impacts. Les défaillances de matériaux telles que les fractures sont “l’une des principales causes de pertes dans l’industrie. Pour inspecter des avions, des trains, des voitures, des routes (…) ou pour comprendre la fracture de tissus biologiques tels que les os, la capacité de simuler la fracture avec l’IA est un vrai changement”, note Markus J.Buelher.

Source : usine-digitale.fr

Le développement de la télémédecine pourrait avoir un impact insoupçonné sur les déplacements en Île-de-France

Chaque jour, deux millions de déplacements sont liés à des motifs de santé en Île-de-France. Alors que les téléconsultations ont explosé pendant le confinement, la massification de cette pratique en période post-crise pourrait entraîner une baisse de 300 000 à 500 000 déplacements quotidiens, majoritairement en voiture, dans la région.

Source : Le développement de la télémédecine pourrait avoir un impact insoupçonné sur les déplacements en Île-de-France