Voilà quelque temps maintenant que des craintes s’expriment un peu partout en France quant à la privatisation des transports publics et la mise en concurrence entre opérateurs. Celle planifiée du réseau francilien, géré par la RATP, inquiète ses salariés mais aussi les usagers. Pendant ce temps l’opérateur part à la conquête du marché lyonnais où Keolis exerçait un monopole depuis plus de trente ans.
Au-delà néanmoins de ces cas d’ouverture au marché et de monopoles en fin de vie, des communes explorent un autre horizon, celui de la remunicipalisation des transports. Plusieurs métropoles ont franchi le pas : Toulouse en 2006, Nice et Clermont-Ferrand en 2013, Strasbourg en 2020, Grenoble en 2021, Montpellier en 2022… Comme nous l’observons dans nos travaux, la remunicipalisation de la gestion des réseaux de transports urbains en France n’est désormais plus un phénomène anecdotique, mais constitue une véritable tendance de fond que nous avons cherché à expliquer.
Plus de 2 150 euros le kilomètre, sans compter le coût du personnel. C’est le prix moyen pour entretenir les routes départementales chaque année, selon l’Observatoire national de la route. Un chiffre en constante augmentation.
En Isère, près d’un milliard d’euros ont été dépensés pour gérer les 4 680 kilomètres de routes en seulement dix ans. Avec la flambée du prix du pétrole et donc du bitume, mais aussi les nombreux éboulements et affaissements de voies liés au désastre climatique, dans combien d’années l’entretien des routes ne sera-t-il plus supportable pour les collectivités locales ?
À l’occasion des départs en vacances estivaux pour de nombreux Français et Françaises, le prix des billets de train reste malheureusement très supérieur à celui des billets d’avion, à trajet égal.
C’est ce que dénonce un nouveau rapport [1] de Greenpeace Europe centrale et de l’Est qui analyse, dans le détail, le fossé entre les prix des billets d’avion, mode de transport extrêmement polluant, et ceux des billets de train, dont l’impact sur le climat est pourtant jusqu’à 100 fois moins important.
Une fiscalité inéquitable au profit des compagnies aériennes et à contre-courant de la lutte contre la crise climatique
En Europe, les billets de train sont en moyenne deux fois plus chers que ceux d’avion pour un même trajet, un trajet entre Barcelone et Londres coûtant même jusqu’à 30 fois plus cher !
Cette différence abyssale entre les tarifs de ces deux modes de transport va à l’encontre de l’urgence climatique et de la nécessité de diminuer le trafic aérien et de développer le réseau ferroviaire. Greenpeace appelle pour cela les institutions européennes et les gouvernements nationaux à rendre les trains plus abordables que les vols.
Selon Alexis Chailloux, chargé de campagne voyage durable chez Greenpeace France :
“Ce rapport démontre, chiffres à l’appui, ce que toutes les personnes qui voyagent en Europe ont déjà expérimenté : une différence de prix délirante entre les prix des billets d’avion et ceux de train pour un même trajet. Pour inverser la tendance, il est urgent de mettre fin aux exemptions fiscales anachroniques dont jouit le secteur aérien. Cela permettra d’investir massivement dans le réseau ferroviaire, et de rendre le train plus accessible”.
La France dans le TOP 3 des pires élèves en Europe
La situation est encore plus prononcée en France, où les billets de train sont en moyenne 2,6 fois plus chers que les billets d’avion. La France se place ainsi en troisième position – à égalité avec la Belgique et derrière le Royaume-Uni et l’Espagne – des pays européens les plus inconséquents en termes de tarification, allant ainsi à contre-courant de l’urgence climatique et de la nécessité de réduire les émissions.
Sur le trajet Paris – Valence (Espagne), par exemple, les billets de train sont en moyenne 8 fois plus chers que l’avion. Comment, avec de telles différences, demander sérieusement à la population de privilégier le train ?
Nécessité d’adopter des mesures politiques impactantes et pérennes
Forte de cette étude inédite Greenpeace demande au gouvernement français de mettre en place des mesures efficaces :
. La fin des avantages fiscaux dont bénéficie le secteur aérien, et l’augmentation de la taxe de solidarité sur les billets afin de financer les alternatives bas-carbone. Le manque à gagner lié aux avantages fiscaux du secteur aérien en France est estimé à 5 milliards d’euros par an par l’association Transport & Environnement.
. L’accessibilité du train pour tout le monde, via la mise en place d’un “ticket climat” – un forfait qui permet d’utiliser le train (hors TGV) de manière illimitée et à un prix abordable -, la relance du train de nuit et le renfort de tarifs réduits sur les trains longue distance pour les personnes à faibles revenus.
La deuxième version de notre Baromètre des pratiques de voyage des jeunes [2] montre justement que la jeunesse française est largement favorable à un rééquilibrage des tarifs entre les billets d’avion et de train (84%) et à la fin des exemptions fiscales pour le secteur aérien (68%).
Une étude récente de la DGT (Direction générale du trésor) n’a pas échappé à la vigilance de la Fnaut (Fédération nationale des associations d’usagers des transports). L’étude conclut, à partir des résultats du Commissariat général du développement durable, qu’en moyenne, les prélèvements ne couvrent qu’un tiers (36 %) du montant des coûts externes de la circulation routière.
Infarctus, stress, réduction des défenses immunitaires… Un rapport de l’Ademe, l’Agence de la transition écologique, démontre les impressionnants dégâts sanitaires causés par le bruit, notamment des voitures et deux-roues. Des dégâts totalement ignorés par les autorités.
Le coût social du bruit en France s’élève à près de 156 milliards d’euros par an, selon une étude publiée hier par l’Ademe, un établissement public, et le Conseil national du bruit (CNB), un organisme affilié au ministère de la Transition écologique. Cette évaluation repose sur les effets sanitaires du bruit, comme les perturbations du sommeil et les maladies cardiovasculaires, et les dépenses de santé qui y sont liées, ainsi que sur les conséquences économiques comme la perte de productivité et la dépréciation immobilière. L’étude rapporte que 68 % de ce coût est lié aux transports, particulièrement routiers, et 17 % au voisinage (particuliers, travaux). « La pollution sonore est un véritable enjeu de santé publique », a estimé la présidente du CNB sur Franceinfo hier. « Au moins un Européen sur cinq est exposé à des niveaux sonores considérés comme dangereux pour sa santé », rapportait en mars 2020 l’Agence européenne pour l’environnement.
C’est sans doute la proposition la plus controversée et commentée de la convention citoyenne sur le climat parmi les 149 remises dimanche 21 juin au gouvernement : le projet de réduction de la vitesse maximale autorisée sur les autoroutes françaises de 130 à 110km/h. Selon le rapport final remis par la convention citoyenne, cette mesure permettrait de réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre (GES) sur les trajets autoroutiers.
Cette proposition-choc, qui intervient quelques mois seulement après la crise des « gilets jaunes » déclenchée par le projet de hausse de la taxe carburant, et après la controverse née de la mesure d’abaissement à 80km/h de la vitesse sur le réseau bidirectionnel, a aussitôt déclenché une levée de boucliers.
Sans attendre les réponses du président de la République Emmanuel Macron aux travaux de la convention citoyenne, attendues le lundi 29 juin, des associations de motards ou d’automobilistes ont ainsi dénoncé « l’inutilité » et le coût économique « très important » d’une telle limitation.
Or, ne nous y trompons pas : si cette proposition est effectivement propice à un débat démocratique, ses fondements techniques sont bien socio-économiques, puisque l’application éventuelle d’une telle mesure aurait de multiples répercussions économiques et sociales.
Certaines seront positives – en matière de réduction des émissions de GES ou de baisse de l’accidentalité par exemple – mais d’autres seront négatives, par exemple en matière de perte de temps ou de report sur le réseau secondaire plus dense en population et plus accidentogène que les autoroutes.
Un gain collectif de 658 millions d’euros…
C’est bien parce que les effets attendus d’une telle mesure sont ambivalents qu’il est nécessaire d’effectuer ce que les économistes nomment « une analyse coûts-bénéfices ». Dans le principe, celle-ci cherche à monétiser l’ensemble des effets socio-économiques pour en faire le solde… que l’on espère bien évidemment positif.
Or, cette analyse coûts-bénéfices d’une réduction de la vitesse maximale autorisée sur autoroute à 110km/h a justement fait l’objet d’une étude réalisée en 2018 pour le compte du ministère de la Transition écologique et solidaire.
Prenons tout d’abord les aspects positifs de la mesure. Selon cette étude, une réduction de 20km/h de la vitesse maximale autorisée sur autoroute génèrerait un gain collectif annuel de 658 millions d’euros. Ces gains se décomposent ainsi : 360 millions au titre des économies de carburant ; 61 millions d’économies du fait de moindres rejets de CO2, auxquelles viennent s’ajouter 53 millions pour la baisse de la pollution locale.
Enfin, il faut compter 149 millions pour la réduction de l’accidentalité et encore 35 millions pour la réduction de la congestion et les dégâts matériels évités.
Et une perte de 1 145 millions d’euros…
Viennent ensuite les effets négatifs de la mesure. Toujours selon cette étude, il faudrait compter 65 millions de coûts d’opportunité pour l’État du fait de la réduction de la consommation de carburant, mais aussi 2 millions pour le remplacement de la signalisation et 100 000 euros au titre du surcroît de bruit résultant du report d’une partie du trafic sur le réseau secondaire, plus proche des lieux d’habitation. Report qui occasionnerait environ 76 millions de manque à gagner pour les sociétés d’autoroutes, mais il convient en toute rigueur d’écarter cette somme de l’équation, car, en l’espèce, ce qui est perdu par les uns est économisé par les autres (en l’occurrence, les usagers particuliers comme professionnels).
Mais c’est surtout la perte de temps engendrée par une telle réduction de la vitesse qui serait préjudiciable. Elle alourdirait la fonction de production à hauteur de 1 145 millions d’euros. Or, cette perte sèche pour l’économie serait probablement répercutée par ailleurs. Selon les cas, elle pourrait, par exemple, occasionner une hausse des prix à la consommation, une pression accrue pour dégager des gains de productivité à marche forcée, voire des ajustements sur la masse salariale.
Payer pour réduire l’empreinte carbone
Au bilan, cette étude chiffre l’inefficacité d’une telle mesure sur le plan socio-économique à hauteur de 554 millions annuels.
Mais attention, il convient de garder à l’esprit plusieurs éléments essentiels :
Une telle étude raisonne à périmètre constant. Or, la technologie évolue, de même que la composition du parc automobile ou les usages. Cela a nécessairement un impact sur les émissions de GES. Il convient donc de la mettre à jour régulièrement pour tenir compte à la fois des progrès en matière d’émissions de GES par kilomètre parcouru, et des modifications comportementales des usagers de la route.
L’allongement du temps de parcours et la hausse du prix relatif pourraient aussi limiter le nombre de déplacements, ce qui réduirait d’autant les coûts liés à la congestion et aux rejets de polluants. Le temps est une variable cardinale en économie, vérifiant l’adage populaire selon lequel « le temps c’est de l’argent ». L’allongement du temps de parcours sera donc perçu comme un coût additionnel et, en tant que tel, provoquera un ajustement comportemental. Il est concevable que les trajets perçus comme les moins essentiels (ou les moins rentables) s’effacent du simple fait de la mesure.
Enfin, certains coûts sont moins aisés à monétiser que d’autres. En France, par exemple, nous évaluons la vie humaine d’un adulte en bonne santé à 3 millions d’euros. À titre de comparaison, ce montant est de 9 millions de dollars aux États-Unis. On le voit, en fonction de la façon dont certains paramètres sont fixés, les résultats peuvent significativement varier.
Toutefois, ce n’est pas parce que cette mesure – en l’état – n’est pas efficace économiquement qu’elle n’est pas socialement acceptable. Nous pourrions collectivement accepter de payer plus pour, notamment, réduire notre empreinte carbone.
Le choix est d’autant plus crucial que ce type de question va désormais se poser, au moins à court ou moyen terme, pour chaque décision relative à la transition écologique. Tout le monde est d’accord sur le principe de réduire les émissions de GES, mais sommes-nous réellement prêts à en payer le prix, en termes économiques, mais aussi d’usages ? En tous cas, quelles que soient les réponses qui y seront apportées dans les prochains jours, ces problématiques auront au moins révélé tout l’intérêt du débat démocratique.
Dans une interview récente accordée au Parisien, Valérie Pécresse déclare vouloir « accélérer le processus de mise en concurrence des transports en Île-de-France ». Les lignes de bus seront bientôt ouvertes à la concurrence à partir du 1erjanvier 2025. Mais la Présidente de région souhaite accélérer et généraliser la démarche pour l’ensemble du réseau.
Selon elle, la mise en concurrence devrait faire « baisser les coûts » et « augmenter la qualité de service ». Elle ajoute : « L’ouverture à la concurrence n’est pas la privatisation. Les lignes pourraient toujours être exploitées par la SNCF ou la RATP, mais elles seraient forcées d’améliorer leur offre pour être compétitives face à d’autres opérateurs, publics ou privés ».
Pourtant, au regard de l’expérience de nos voisins européens, la fin d’un monopole public du rail n’est ni gage d’une amélioration de service, ni d’une baisse des coûts.
Les directives européennes
Comme l’explique Valérie Pécresse, l’ouverture au marché d’un secteur consiste à mettre fin à une situation de monopole en permettant à de nouveaux opérateurs d’intégrer ce marché. Ce n’est pas une privatisation. L’État reste détenteur des capitaux de l’entreprise.
Cette politique est fortement encouragée par l’Union européenne particulièrement sur le marché de l’énergie (électricité et gaz). Elle est souvent un préalable à la privatisation qui représente un transfert d’une partie, voire de la totalité du capital d’une entreprise du secteur public au secteur privé (Française des jeux, en novembre 2019).
En Europe, la privatisation du rail s’est traduite par une augmentation des prix et une perte de la moitié des effectifs, et ce même dans les pays à forte productivité. En outre, la transition du secteur public au privé induit une précarisation de statut des cheminots. Nous sommes donc bien loin d’une amélioration de service ou d’une baisse des coûts.
En Grande-Bretagne et ailleurs
En Grande-Bretagne, on a observé le développement du travail à temps partiel et donc des réductions importantes du salaire moyen. En Espagne, les négociations salariales ne sont plus régionales mais effectuées entreprise par entreprise et sont indicées sur le chiffre d’affaires. En Irlande, on a constaté une augmentation des heures supplémentaires non rémunérées.
Chez nos voisins anglais, malgré des augmentations de fréquentation, les prix du billet sont six fois supérieurs à la moyenne européenne pour un service de moindre qualité et ont bondi de 25 % (hors inflation) depuis 1995. Un usager britannique dépense en moyenne 14 % de son salaire mensuel dans les transports.
Les trains anglais demeurent les plus chers en Europe et cela malgré des subventions importantes de l’État anglais. Dans un sondage officiel, 60 % des Britanniques sont favorables à une renationalisation des transports d’autant plus que cette opération permettrait une économie de plus d’1,5 milliard de Livres qui permettrait de réduire les tarifs de 18 %. En outre, la qualité du service s’est détériorée engendrant des retards considérables, des trains bondés et des accidents qui ont marqué la conscience collective (accident de Hatfield en 2000 avec un bilan de 4 morts et 70 blessés).
Le constat allemand
Le constat est plus spectaculaire en Allemagne. L’ouverture du rail à la concurrence remonte à 1994 et a engendré un coût social important avec des effectifs qui sont passés de 350000 à 220000. La privatisation du rail reste cependant légère avec seulement 10 % des 33000 km, passés sous gestion privée.
De 2005 à 2016, les tarifs moyens ont explosé de 40 % pour les trains régionaux (environ 2,2 fois plus vite que l’inflation sur la période) et de 31 % pour les trains longue distance (environ 1,7 fois plus vite que l’inflation). La qualité du service s’est également détériorée avec notamment un train sur quatre en retard et des accidents de plus en plus nombreux.
Plus loin, le modèle japonais est très marqué par son efficacité et l’absence de retard mais avec un revers de la médaille : la cherté du service. Ainsi, il faut débourser plus de 200 euros pour un trajet de deux heures. C’est l’équivalent d’un aller-retour Paris-Lyon.
Le coût de la privatisation
Lors d’une privatisation, l’acquéreur privé intègre dans ses charges le coût du capital qui représente la rémunération qu’il doit verser aux actionnaires et aux agents qui l’ont financé. Ce coût supplémentaire est répercuté sur le prix de vente final et fait croître ainsi le prix payé par le client.
Fatalement, la privatisation conduit à une augmentation du prix pour les usagers. Seule une situation extrêmement concurrentielle pourrait amener une entreprise privée à réduire fortement ses coûts, ce qui la dissuaderait au final à investir dans l’activité.
En définitive, on comprend bien que la concurrence pure et parfaite développée par la théorie néoclassique, modèle économique qui vise une situation d’équilibre déterminant les quantités et les prix des biens, ne peut s’appliquer ici. En réalité, « elle est plus rare encore qu’un train italien arrivant à l’heure ». En effet, le marché des services publics s’efforce d’augmenter le bien-être collectif tout en évitant les pertes. Son objectif n’est pas le profit maximum mais la satisfaction maximale de la société, quitte à engendrer un déficit ne répondant pas aux principes de la concurrence. En tout état de cause, « la libéralisation ne conduit pas à une baisse des prix, bien au contraire souvent ».
Le Sénat a présenté un rapport sur la gratuité des transports en commun. Se basant sur l’expérience des 29 communes qui la pratiquent en France, les auteurs estiment que la gratuité peut être intéressante, mais pas pour tous les profils de collectivités.
Alors que les problématiques de pouvoir d’achat et de développement durable n’ont jamais été aussi présentes dans les discussions, et que les élections municipales de mars 2020 approchent, le sujet de la gratuité des transports publics revient dans le débat public. Plusieurs candidats proposent en effet cette mesure comme moyen d’inciter les citoyens à privilégier le transport public plutôt que la voiture.
Mais la gratuité est-elle la meilleure façon de parvenir à un changement des habitudes de mobilité ? Un rapport du Sénat a été publié le 26 septembre. En 128 pages, il détaille les expériences des 29 communes ou établissements publics de coopération intercommunale qui pratiquent actuellement en France la gratuité des transports collectifs. Il arrive à la conclusion que « la gratuité totale des transports collectifs ne constitue ni une fausse ni une bonne idée en soi. Tout dépend dans quel but elle est mise en œuvre ».
Sur ces 29 collectivités, une grande majorité est de petite taille, souligne le rapport. Quatorze comptent moins de 15 000 habitants ; six entre 15 000 et 50 000 ; six entre 50 000 et 100 000 habitants ; et seulement trois dépassent les 100 000 habitants : Aubagne (105 000 habitants), Niort (120 000 habitants) et Dunkerque (198 000 habitants). Ces trois dernières seront rejointes par la communauté d’agglomération de Grand Calais Terres et Mers (103 000 habitants) en janvier 2020.
Conséquence de la taille réduite de ces communes, le bus est généralement le seul moyen de transport concerné par la gratuité (seule exception, Aubagne, qui dispose d’un tramway). Peu gourmand financièrement, le bus peut être rendu gratuit sans mettre à mal le budget municipal. Souvent, la faiblesse des recettes facilite même le passage à la gratuité : à Dinan ou dans la communauté de communes de Moselle et Madon, les recettes de billetteries potentielles des bus ont été évaluées à un niveau inférieur à celui du coût de leur gestion (vente des billets, appareils de compostages, contrôleurs…), d’où la décision de les rendre gratuits.
Cet effet d’aubaine, pour les communes, ne se retrouve pas sur les réseaux lourds (métros, tramways), qui nécessitent des investissements importants et sont massivement utilisés. Ainsi, en Île-de-France les recettes tarifaires représentaient en 2017 36 % du coût total des transports de la région, soit 3,8 milliards d’euros. Les frais de gestion (vente, contrôle…) étaient, eux, de 250 millions d’euros. La gratuité totale aurait donc un coût très important pour la collectivité… et donc le contribuable.
Peu d’impact sur le trafic automobile
En plus du coût potentiellement important, la gratuité n’engendre pas forcément les effets escomptés. Si les études disponibles sur les effets de la gratuité sont « peu nombreuses, voire anciennes », note le rapport, qui préconise la création d’un observatoire national de la tarification des transports collectifs, les sénateurs soulignent que « la gratuité des transports n’a qu’une capacité limitée à engager une transformation en profondeur de la société et de l’espace ».
S’il s’agit de faciliter la mobilité des plus démunis, « une tarification solidaire fine peut se révéler aussi utile que la gratuité totale », précise le rapport. Et concernant la pollution, ses effets seraient limités : « Beaucoup d’observateurs ont estimé que la gratuité des transports consiste avant tout à remplir les bus de piétons et de cyclistes », écrivent les sénateurs. En particulier en cas de mauvais temps. 1 % à 2 % des conducteurs de voitures se tourneraient vers les transports publics en cas de gratuité, contre 2 % à 4 % des piétons et 5 % à 7 % des cyclistes.
Si ce risque est peu avéré dans les villes où la part des vélos est insignifiante, il est plus important à Paris où les déplacements à pied (9,3 %) ou en deux-roues (7,7 %) sont plus fréquents. Selon une estimation, la gratuité des transports parisiens ne réduirait le trafic automobile que de 2 %, tandis que le réseau de transports – déjà saturé – verrait un accroissement de 10 % de ses passagers.
Différents acteurs interrogés dans le cadre de la mission, dont la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut), estiment que les efforts financiers qui peuvent être consentis doivent servir « à améliorer l’offre et non à octroyer la gratuité à ceux qui n’en ont pas besoin ». « Les usagers qui abandonnent la voiture sont ceux qui ont les moyens de choisir ; or ils ne le font que si le transport collectif s’avère plus rapide », indique la Fnaut.
S’appuyant sur diverses sources de données et plusieurs outils de développement informatique, cette application web permet aux producteurs de calculer les coûts économiques et environnementaux des livraisons à leurs clients.
Hostile à la gratuité pour tous des transports urbains, une idée qui revient en force avec le récent passage à l’acte d’une grande agglomération comme Dunkerque, la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut) a défendu ce 13 septembre son argumentaire et déconseille aux élus de se lancer.
Rendre gratuits les transports publics urbains ? C’est un par un que la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut) a déconstruit, ce 13 septembre lors de sa seconde conférence de presse de rentrée, les arguments avancés par les partisans de cette mesure “idéologique mais qui ne correspond pas à la demande sociale”, certes “séduisante à court terme mais contre-productive à moyen terme”. Et ce même, selon cette association, dans les petites agglomérations.
Peu coûteuse là où l’offre est médiocre
Instaurée “ces dernières années dans une trentaine d’agglomérations initialement de taille réduite (moins de 30.000 habitants), elle s’est étendue peu à peu à des agglomérations plus importantes comme Gap, Vitré, Compiègne, Châteauroux, Castres-Mazamet, Aubagne, Niort et dernièrement Dunkerque”, resitue la Fnaut. Première observation : dans celles qui adoptent la gratuité pour tous et sur l’ensemble du réseau, l’offre de transports est jugée “très médiocre” par l’association d’usagers. Médiocre, c’est à dire “sans transport collectif en site propre (TCSP) et avec de faibles fréquences”. L’offre de transports, peu coûteuse dans ce cas pour la collectivité locale, génère aussi de faibles recettes de billettique.
Un manque à gagner très variable
La Fnaut prend pour exemple la communauté urbaine de Dunkerque qui, après l’avoir expérimenté le week-end et les jours fériés, vient de faire un pas de plus en passant début septembre à la gratuité sept jours sur sept de son réseau de bus (voir notre article dans l’édition du 5 septembre). La perte sèche liée à l’abandon de ces recettes n’y est pas jugée insurmontable. Le manque à gagner y est de 4,5 millions d’euros par an. Pour la Fnaut, ce n’est guère représentatif car “le taux de couverture des coûts n’est que de 10% à Dunkerque”. Ce qui rend effectivement la gratuité peu coûteuse à court terme. Mais ailleurs, un tel manque à gagner léserait beaucoup plus une collectivité. “Appliquée à Strasbourg ou Grenoble, la gratuité coûterait plus de 50 millions d’euros par an, 100 millions d’euros à Lille et trois milliards à Paris, “soit le montant des investissements en Île-de-France”, estime l’association.
Pas d’ombre faite à l’automobile
La Fnaut reconnaît que la gratuité a une “bonne image de marque” et certains avantages comme le fait de faciliter le travail des conducteurs. Valables à court terme, ils le seraient moins à moyen terme. La hausse de la fréquentation est souvent mise en avant. Gare aux illusions, prévient la Fnaut, elle est souvent estimée, non mesurée et pour l’augmenter, mieux vaut améliorer l’offre, par exemple en musclant les fréquences, la vitesse commerciale, le confort à bord ou en revoyant les priorités de circulation.
L’utilité de la gratuité est aussi remise en cause dans la clientèle qu’elle attire : des captifs, des piétons, des cyclistes mais pas massivement des automobilistes (report modal). Par ailleurs, la corrélation entre le prix du billet et le niveau de fréquentation du réseau n’est pas certaine. L’exemple lyonnais est cité : les tarifs y sont au contraire élevés… et la fréquentation aussi. A l’inverse la fréquentation serait faible à Aubagne et Niort, du moins inférieure à la moyenne des villes de même taille.
Effets pervers et motifs d’abandon
Résumé en une phrase, le constat serait le suivant : “Malgré ses apparences séduisantes à court terme, la gratuité est une fausse bonne idée car, à moyen terme, ses effets pervers desservent les intérêts des usagers et de la collectivité”. A l’heure où les moyens financiers des collectivités diminuent “alors que les besoins de transport public croissent”, cette gratuité “monopolise les ressources nécessaires pour investir et renforcer l’offre”. La Fnaut cite la réduction de l’offre à Niort et l’abandon d’investissements à Aubagne (tram-train) et Niort (BHNS). “A Toulouse et à Pau, les promesses électorales de gratuité des anciens maires socialistes n’ont pu être tenues”, relate-t-elle. De grandes et petites villes ont aussi fini par l’abandonner en cours de route. Par exemple Bologne, en Italie, qui dispose d’un remarquable réseau de transport urbain et périurbain “qui n’aurait jamais vu le jour si la gratuité avait été pérennisée”.
Gart et UTP hostiles à la gratuité
Comme la Fnaut, le Groupement des autorités responsables de transport (Gart) et l’Union des transports publics et ferroviaires (UTP) restent hostiles au principe de la gratuité. Ils ont rappelé leur position ce 12 septembre, à l’occasion de la présentation de la prochaine Journée du transport public qui se tient samedi. Pour Louis Nègre, président du Gart et maire de Cagnes-sur Mer (Alpes-Maritimes), il appartient à chaque élu de choisir, en vertu de la libre administration des collectivités. Mais “la gratuité revient à faire payer le contribuable à la place de l’usager”, ce qui ne paraît pas “juste”, estime-t-il. Il est préférable selon lui de développer les tarifications solidaires permettant aux personnes qui ont peu de moyens d’accéder facilement aux transports en commun. “Le budget transport est déjà le premier budget dans la plupart des agglomérations, souligne-t-il. Si on instaure la gratuité, il faut l’augmenter de 30%. Dans ce cas, soit on augmente les impôts pour compenser, soit on baisse les investissements, ce qui entraîne une dégradation du service.” Frédéric Baverez, président du GIE Objectif transport public et vice-président de l’UTP soutient la même position. “La tarification est la compétence exclusive des autorités organisatrices. Mais l’UTP est contre la gratuité. Si on se prive de la ressource apportée par les usagers, on risque de dégrader le service et en plus on prend des parts modales au vélo ou à la marche, et non à la voiture.” Anne Lenormand
La tarification constitue un élément important de l’attractivité des réseaux de transport public. De la compétence des autorités organisatrices de transport, elle relève d’un choix politique même si les exploitants sont, bien évidemment, force de proposition en la matière. La politique de tarification doit concilier trois objectifs à caractère parfois antagonistes : couvrir les coûts de production du service, favoriser une politique de report modal et de fidélisation des usagers et, enfin, garantir le droit au transport pour tous.
Les élus du GART défendent la liberté des autorités organisatrices de transport en matière de politiques tarifaires et respectent le choix de certaines d’entre elles d’offrir la gratuité totale sur leur territoire. Si celle-ci peut être pertinente dans certains réseaux où les recettes tarifaires sont très faibles, voire inférieures au coût de la perception, elle ne peut toutefois pas être généralisable à l’ensemble des territoires.
Les entreprises et les administrations sont les principaux contributeurs au travers du versement transport lequel apporte 47 % du financement, tandis que les collectivités locales, les usagers et l’État y participent, respectivement, à hauteur de 35 %, 17 % et 1 %.
Ce dépliant présente la position des élus du GART sur le sujet et référence les réseaux adoptant soit une gratuité totale, soit une gratuité conditionnée.
Ce rapport fait suite à une étude réalisée sur l’intermodalité entre la voiture et le train (Parcs-relais pour l’intermodalité voiture + train ; Revue bibliographique et études de cas de gares à vocation interurbaine) disponible sur le site de la DTecITM.
Cette étude comportait une comparaison des temps de parcours routiers et intermodaux (voiture+train) vers la gare de la ville principale de la région. Il a été choisi de traiter l’aspect coûts séparément dans cette note, en raison de sa complexité.
Notamment, se pose la question de la perception du coût par les usagers, car celui-ci peut varier en fonction des usagers (abonnements train ou télépéage) et se décompose en parts fixes et variables, notamment pour la voiture (coût d’achat, de roulement, d’entretien, d’assurance)
L’objectif de cette note est ainsi de connaître les différents postes qui composent le coût de la voiture et du train et de mettre en évidence la différence entre le coût complet moyen et le coût “ressenti”. Cette note est organisée sur deux parties :
Partie I : Détermination du coût “ressenti” de la voiture et du train à partir d’une synthèse bibliographique (avec une comparaison sur des liaisons régionales).
Partie II : Estimation du coût “complet moyen” de la voiture et du train à partir d’une synthèse bibliographique (avec une comparaison sur des liaisons régionales).